L’histoire des communes de Montricher et Albanne

Albanne

Origine

En patois : arbone  = los arbaniaux = Les albanniaux

D’après le Chanoine Gros cela était la propriété d’un romain qui s’appelait Albanus. On retrouve le préfixe alb qui veut dire blanc dans les toponymes celtiques.

Géographie :

La superficie : 1703 hectars dont 475 en forêt.

Altitude : 1616m, le point culminant est la Grande Chible à 2932m.

Les hameaux : *Albannette dont les habitants s’appelaient les bouinas. Ce surnom viendrait du procès contre Valloire où les habitants ont eu consigne de ne pas trop parler. Ils répondaient par oui ou na (non).

                     * Beau Mollard : incendié en 1793.

Histoire

La référence la plus ancienne remonte à 1040. Une riche veuve du nom d’Ermengarde remet ses biens (église et espace d’Albanne) au Chapitre de la cathédrale de Saint-Jean. En effet, les paniques de l’an mil avaient permis à de nombreux laïcs d’accaparer les biens ecclésiastiques.

Au 12ème siècle, Albanne appartient à l’Evêque de Maurienne. Il y exerce sa juridiction et en perçoit les impôts.

En 1471, l’Evêque accorde à la paroisse de Valloire un droit de bûcheronnage ou droit d’usage, sur les forêts d’Albanne et en partie de Montricher. C’est l’origine d’un procès qui ne se finira qu’en 1846 et 1860 pour la partie de la Mélézia qui fut attribuée aux habitants d’Albannette.

Le recensement pour établir la gabelle sur le sel en 1561 nous fournit un état précis de la population : 84 familles soit 363 habitants.

Suite à la contre-réforme, la paroisse va construire la chapelle d’Albannette (St Jacques) vers 1650, l’église d’Albanne (St Alban) en 1681 et la chapelle d’Albanne (ND de Pitié) en 1701, toutes de style baroque.

En 1768, l’Evêque de Maurienne abolit ses droits féodaux. Albanne doit s’acquitter de la somme de 10 200 livres. A l’arrivée des révolutionnaires français en 1792, la dette n’est pas apurée, elle est annulée.

La bataille d’Albanne. Après l’invasion française de 1792, un détachement français est établi à Valloire avec comme mission de surveiller une éventuelle attaque de la Maurienne par le Galibier. Un poste d’observation est installé à la Turraz, aujourd’hui le Pain de Sucre. Le Marquis de Cordon à la tête d’un petit détachement constitué par plusieurs paysans locaux s’empare du poste. La nuit suivante, les français contre-attaquent et reprennent le poste. En représailles, le village d’Albanne dont les couvertures étaient en chaume est entièrement incendié. C’est ce que la postérité a retenu sous le nom de la bataille d’Albanne.

En 1839, un feu de cheminée non maîtrisé, provoque l’incendie de tout le village. 360 personnes se trouvent sans abri, 4 y trouvent la mort, beaucoup émigrent.

Lors du référendum de 1860, en faveur du rattachement de la Savoie à la France,  on relève 91 inscrits et 87 »oui ».

En 1887, la commune adjuge la construction d’une école, dès 1852, les habitants d’Albannette avaient construit la leur, entièrement à leurs frais.

La ville de Saint-Jean réalise un captage d’eau en aval d’Albanne en 1906 et construit une canalisation jusqu’à Saint-Jean. Ces travaux seront complétés en 1957 par de nouveau captages dans les pâturages.

La guerre de 1914/1918 va entrainer la mort de 24 habitants.

Il faudra attendre 1931 pour que le village soit alimenté en électricité depuis le Col du Télégraphe et, en téléphone, depuis Montricher.

Les réseaux d’eau potable sont créés en 1939 à Albanne et Albannette, le réseau d’assainissement ne sera réalisé qu’en 1965 à l’occasion de la construction de la route qui traverse le village. Cette route sera poursuivie jusqu’à Albannette et terminée en 1968.

En 1968 également, création du parc communal d’Albanne.

Notons qu’en 1962, la classe unique d’Albanne avec seulement 3 élèves est définitivement fermée. La population est réduite à 88 habitants en 1968, il devient impossible au Conseil Municipal de tenir des réunions : le Maire et 2 Conseillers seulement s’y rendent.

Il est alors envisagé de solliciter un rattachement avec la commune de Montricher qui sera effectif au 1er janvier 1970.

Evolution de la population

Le recensement pour établir la gabelle sur le sel en 1561 nous fournit un état précis de la population : 84 familles soit 363 habitants.

Celui de 1759 donne 465 habitants. La population s’établit à 628 habitants en 1800. A partir de là, elle va inexorablement décroître jusqu’en 1985. 314 habitants sont recensés en 1900, 88 en 1968, soit 2 ans avant la fusion avec Montricher et 8 en 1985.

Le développement touristique, station des Karellis, la construction du lotissement ont arrêté l’hémorragie.

Aujourd’hui, le village compte environ 35 habitants permanents, Albannette n’en comptant qu’un seul. 

Montricher

Origine

On trouve, dans les écrits, le nom de Montrocher au 17 ème siècle mais aussi Montrichel au 18ème siècle. C’est une dernière appellation qui a laissé le nom de Montrichelain pour ses habitants, en patois Morshel et Morshelains. Les habitants sont aussi surnommés les vordaches (les écureuils) car ils descendaient et remontaient pour aller travailler en vallée.

Géographie

Les hameaux:

* Le Bochet (bosquet) qui deviendra le chef-lieu  de la commune en 1962

* Les karellis à 1650 m construit de toute pièce sur les anciens pâturages et inauguré en 1975 pour devenir la station touristique de la commune.

Histoire

Le secteur de Montricher avait pourtant été habité bien avant. Des pièces de monnaie à l’effigie d’Alexandre Severe (222 après JC) retrouvées à Montricher témoignent de la présence romaine à cette époque.

Un cimetière burgonde (480 après JC) a été découvert en 1973 lors de l’agrandissement de la salle hors sac des Karellis. Il faut attendre 1184 pour avoir une trace écrite de l’existence de la paroisse. Montricher est alors rattaché à la Châtellerie de Valloire sous la juridiction de l’évêque de Maurienne. Dès 1513, les habitants mettent en cause la décision de l’évêque d’attribuer un droit d’usage en faveur des habitants de Valloire sur la forêt des Loyes ce qui va conduire à une intervention de l’évêque en 1570 pour mettre fin à un long procès entre Montricher et Valloire, procès qui ne finira qu’en 1846 où le droit d’usage s’est transformé en droit de propriété, Montricher obtenant quand même un droit de pâture. Cette forêt a une superficie de 120 ha, 59 sur le territoire de Montricher et 61 sur le territoire d’Albanne.

En 1561, les registres d’établissement de la gabelle font apparaitre 59 familles soit 272 habitants, 96 bovins, 222 ovins et 112 caprins.

Au 15ème et 16ème siècle, de nombreuses épidémies de peste et de lèpre ont touché les populations : en 1630, 33 personnes sont décédées en 3 mois (soit 10% de la population). Seules, les prières étaient censées apporter la protection divine contre ces fléaux. Sainte Marie Madeleine est invoquée dans une longue représentation théâtrale appelée « mystère ». A Montricher, son texte a disparu mais on conserve, fait rarissime la sanction en cas d’absence de quelqu’un à la représentation.

Entre 1729 et 1733, le roi Amédée fait établir un cadastre dans l’ensemble du royaume. La France attendra Napoléon pour l’entreprendre sur son territoire.

Vers 1706, il est recensé 5420 parcelles, 132 maisons, 77 granges et 12 moulins. Il faut noter qu’en 1706, l’évêque autorise la communauté de Montricher à établir son propre moulin (c’est une relâche du pouvoir banal détenu par l’évêque sur les moulins).

A Partir de 1790, de nombreux dons sont faits en vue de la construction d’une école – la paroisse à partir de 1835 provisionne chaque année une certaine somme à cet effet. En 1846, le curé détourne l’argent destiné à la construction de l’école pour la reconstruction de l’église.

De type néoclassique, elle est dédiée à Sainte Marie Madeleine. Les fondations : l’approvisionnement de pierres, de sable et de chaux est fait par corvées en fonction de l’imposition des contribuables, au nombre de 243. L’école ne sera construite qu’en 1864, le 1er étage est partagé entre maison commune et logement.

En 1860, le référendum pour le rattachement de la Savoie à la France donne : oui, 80 non ,3 inscrits 83.

La suppression des droits de douanes et la mise en service de la ligne de chemin de fer vont donner une formidable impulsion au développement des carrières d’ardoises. Le Bochet va se développer (le village n’était alors constitué que de remues habitées 3 semaines au printemps, 2 semaines d’été et 3 semaines en automne en fonction de l’activité agricole.

Une quarantaine de maisons sont construites entre 1860 et 1890, 150 ouvriers travaillent aux carrières en 1900. Ils sont originaires de Piémont  et des Bauges. Ces derniers ont été ruinés par l’abolition du droit de douane et l’introduction massive des produits de taillanderies françaises moins chères que ceux fabriqués sur place avec le minerai de Maurienne.

En 1901, l’école ouvre enfin. L’effectif est de 24 français et de 24 piémontais. Le bâtiment est construit en 1905. Certaines familles vont alors se fixer au Bochet. Les migrations entre Le Bochet et Montricher vont peu à peu s’inverse. Beaucoup ne montant plus à Montricher que de juin à octobre.

Le développement industriel du fond de vallée va impacter la commune. En 1882 Félix Roche ouvre une carrière de gypse au Champet qui deviendra Saint-Félix en référence à son nom.

En 1898, Charles Grange y crée une usine de carbure de calcium remplacée de 1903 à 1910 par une usine d’aluminium qui fonctionne grâce à la centrale électrique contigüe.

Les premières pollutions sont constatées. Les émanations de fluor détruisent les vignes alentours. L’usine est fermée suite à de nombreuses protestations des propriétaires.

Ensuite, Charles Grange achète les terrains pour construire une centrale hydro-électrique au Bochet. Elle est mise en service en 1913. En même temps, les frères Rochette démarrent la fabrication du carbure de calcium dans l’usine contigüe qu’ils viennent de construire.

Suite à cela, le village du Bochet est alimenté en électricité dès 1913, Montricher le sera en 1917.

Le raccordement au réseau téléphonique est demandé en 1901. La fabrication du silicium ne commencera qu’en 1952 et à partir de 1982, l’usine s’oriente vers le photovoltaïque.

Les travaux de construction de la route entre Le Bochet et Montriche commencés avant la guerre 14/18 sont interrompus pendant la durée de la guerre. Ils ne sont repris qu’en 1920 et terminés en 1925.

Le monument aux morts est érigé en 1922 : On y trouve le nom de 20 soldats de la commune. 7 combattants nouveaux sont rajoutés après la guerre de 39/45. La commune se verra attribuer la croix de guerre avec palme pour l’action de son maquis.

Entre 1926 et 1936, Montricher et Le Bochet sont équipés d’un réseau d’eau potable et de tout à l’égout.

Entre 1939 et 1945, le maquis de résistance se développe. Les allemands incendient Le Bochet le 24 août 1944, seules quelques maisons plus dispersées (quartier des Sauges) sont épargnées. Pour la reconstruction, la commune dut créer un remembrement, construire des dessertes : route du 24 août et de terre carrée pour permettre la reconstruction des maisons effectuée entre 1946 et 1959. La chapelle étant la dernière reconstruction. Une aide très appréciable vint de la commune de Montricher en Suisse.

La modernité de ces nouveaux bâtiments, la proximité des industries de fond de vallée et l’abandon progressif de l’agriculture va participer au déclin du village de Montricher. En hiver 1960, il ne reste au village de Montricher que 3 habitants.

L’école est fermée à la rentrée 1959, elle ne rouvrira qu’en 1978 grâce à la création des Karellis.

La commune prit très vite conscience du déclin du village et pensa sous l’impulsion de la société de ski crée en 1935 que le tourisme était la seule solution.

Le plan « neige » élaboré par le département encourageait la maitrise du foncier. La commune s’y attela. Entre 1960 et 1962 tous les terrains de la montagne furent achetés (pratiquement sans expropriation).

En 1962, le chef-lieu est transféré au Bochet, une mairie avec une salle des fêtes est construite. La commune prend le nom de Montricher-Le Bochet.

Ce transfert de population de Montricher vers Le Bochet aura permis à la commune de maintenir sa population contrairement à ce qui s’est passé dans beaucoup de commune de montagne, entre autre Albanne.

Les exigences de la commune ne facilitent pas l’implantation aux Karellis d’un promoteur. Elle va donc, seule commencer les aménagements de sa station de skis : poursuivre la construction de la route d’accès, réalisée dès 1954 jusqu’au Plan Thimel en route forestière, construire des remontées mécaniques, effectuer les captages et les réseaux d’eau, créer une salle hors sac.

En 1969, la commune d’Albanne se dépeuple, la vie municipale y devient impossible, son maire, M Motard ne voit qu’une solution : la fusion avec Montricher-Le Bochet. Sa demande est acceptée et officialisée par arrêté préfectoral le 1er janvier 1970.

3 conseillers municipaux de Montricher démissionnent pour accueillir 3 conseillers d’Albanne jusqu’aux élections de 1971.

La nouvelle commune prend le nom de Montricher-Albanne. Si sur Montricher cette fusion ne crée pas de problèmes, il n’en est pas de même à Albanne où la vieille génération n’a pas apprécié de « se donner à Montricher ».

Montricher-Albanne

Le fait marquant de cette époque est la signature d’une convention avec l’association Renouveau en 1973. Renouveau s’engage à construire et exploiter, au nom de la commune, un bâtiment de 600 lits. La commune lui concède une exclusivité pour la construction d’une station touristique. Elle portera le nom de Montricher-Les Karellis.

Renouveau s’associe avec 5 autres associations. Le groupement est géré par un Conseil Supérieur des Karellis.

Renouveau, au travers du CSK s’engage à assurer à ses frais toutes les infrastructures et prend en charge les investissements réalisés par la commune qui ne demande, en échange, aucune redevance. Cette convention pour 30 ans sera renouvelée par anticipation en 1997. Aujourd’hui, suite à la loi « Sapin » elle se transforme en Délégation de Service Public. Les 5 autres délégataires sont liés par bail amphithéotique de 99 ans. A son terme, toutes les constructions doivent revenir à la commune.

Le bâtiment Renouveau est inauguré en 1975, toutes les constructions sont terminées en 1980.

En 1976, un réseau d’assainissement est construit à Albannette. En 1980, une ligne de téléphone  et Albannette va être le premier village de la commune à bénéficier des réseaux souterrains. A partir de 1990, la commune lance un vaste programme de réfection et d’enfouissement des lignes électriques et téléphoniques. Des lotissements sont réalisés dans les 3 principaux villages. Des gites communaux sont aménagés : cure à Montricher et école à Albanne en 1978. En 2013 et 2014, c’est la cure d’Albanne qui est entièrement reconstruite.

La commune présente aussi en 1986 pour la première fois, un projet d’Unité Touristique Nouvelles(UTN). Le projet est déclaré d’utilité publique ce qui permet d’acquérir le foncier à l’amiable ou par expropriation, de réaliser les captages d’eau, les réseaux et une cuve de 500m3. L’urbanisation doit faire l’objet d’une autre présentation aux UTN, la commune réussit, non sans mal, d’exclure le lotissement Planchamp de cette formalité. En 2002, la commune désire démarrer l’urbanisation et représente le dossier aux UTN. Le préfet de région donne son accord mais il est attaqué par une association communale soutenue par les écologistes. Le tribunal annule alors l’arrêté préfectoral en 2006. La commune fait appel mais le projet est abrogé en 2009.

Dans le cadre du développement de la commune, quelques travaux sont à signaler.

     - En 1992, l’ouverture de la voie de Lécherrenne en passage de 4m de large relie Albannette à Valloire. Même si la longueur n’est pas la même sur les deux communes, la dépense est supportée à part égale par les deux communes de Montricher et Valloire mais l’ONF assigne les deux communes au Tribunal de grande Instance. L’ONF sera condamné aux dépens ce qui freina leur obstruction pour ouvrir la Drouza.

    - Les eaux usées des Karellis et de Montricher sont raccordées à la station d’épuration de Saint Michel puis en 2004 le dernier tronçon de canalisation Albanne Calypso est terminé. La ville de Saint Jean a participé pour 50% aux fouilles sur la partie basse afin de pouvoir changer sa conduite d’eau.

     - L’élargissement et l’enrobage de la route d’Albannette en 2005 en vue d’un prolongement vers Valloire

     - La construction d’un réservoir de 300m3 au Bochet en 2009

     - En 2006, la construction d’un écomusée à Montricher entièrement géré par des bénévoles.

On peut aussi faire mention de fours à pain, soit construits, soit rénovés dans chaque village.

Un grand merci à Jean Verney de nous avoir transmis son savoir sur l'histoire de la commune.

Date de dernière mise à jour : 12/03/2022